• Lorsque les âmes s\'en vont - chapitre 23

     

     

    âmes

     

    CHAPITRE 23

     

     

    Je voyais devant moi une chose que je n’avais pas prévue. Nous n’étions pas seuls. A différents endroits du cimetière quelques fantômes flottaient. Certains se frottaient les mains souriant à pleines dents, d’autres avaient le visage triste et inquiet. Ils savaient qu’ils se passaient quelques choses et voulaient être aux premières loges.

    J’étais content à cet instant que Justine ne puisse pas voir ce spectacle. Il était si bizarre si incompréhensible pour quelqu’un de normal.

    Sam était là également mais d’un seul coup d’œil j’ai vu qu’il ne désirait pas que je m’approche. Son regard s’est dirigé vers sa droite et j’ai vu des formes lumineuses. Des anges ? C’était impossible jamais je n’avais entendu dire qu’ils se montraient ouvertement aux humains. Ils agissaient toujours dans l’ombre.

    A cet endroit je me suis moi-même senti comme un animal prit au piège. Nous étions des cobayes, des sujets de recherches pour les anges avides d’expériences.

    Ma colère grandissait mais je devais me concentrer sur cette mission. Sauver Justine et renvoyer Peter dans le monde auquel il appartenait maintenant.

    Comment les supérieurs de Sam pouvaient-ils laisser quelqu’un comme moi faire leur sale boulot. J’avais du mal à digérer leur façon de faire.

    Justine a sursauté et m’a agrippé fermement. Peter s’était matérialisé devant nous. Ses yeux n’étaient plus de la même couleur. La folie l’avait gagné, ce qui le rendait encore plus dangereux.

    Etait-il conscient de nos spectateurs ?

    Je n’en étais pas sûr. Son regard était fixé aux nôtres. Sa haine était perceptible.

    Je serrais dans mes bras cet être fragile et apeuré.

    -          - N’aies pas peur, je suis avec toi. Es-tu prête à lui parler ? demandais-je tout bas à Justine.

    -          - Oui, répondit-elle d’une voix tremblante. Si je te sens près de moi ça ira. Je serais forte.

    Elle m’a lâché et s’est avancé vers le fantôme de Peter.

    -          - Peter ! Pouvons-nous parler ?

    -          - Qu’est-ce que tu aurais à me dire traitresse ? Tu veux venir avec moi à condition que je laisse vivre ce bellâtre ?

    -          - Non ça n’a rien voir avec Grégoire. Je veux que l’on parle de nous. Accorde-moi ce dernier souhait.

    Il la regardait cherchant dans son regard si elle lui disait la vérité.

    -          - Je t’accorde un peu de temps ensuite que tu le veuilles ou non tu me suivras.

    Justine s’est encore éloignée de moi s’approchant encore de Peter. C’est alors que j’ai vu Mathilda sortir de nulle part et tracer un trait sur le sol formant un rond autour de Justine et Peter.

    Peter a essayé de s’échapper mais c’était comme si une barrière invisible se dressait devant lui. Mon cœur battait plus vite, je me rendais compte qu’ils étaient enfermés dans une cage. J’avançais vers Justine mais Mathilda s’est dressée devant moi.

    -          - Non Grégoire ! Tu ne dois pas franchir la ligne. Ai confiance en moi et surtout en Justine. Elle y arrivera, me dit-elle tout bas.

    Je n’avais pas envie de répondre à la vieille dame. J’étais en colère, impuissant et surtout j’avais peur pour Justine. Mais elle avait raison Justine était plus forte qu’avant. Je savais qu’elle m’aimait et qu’elle ferait tout pour me revenir.

    -          - Tu m’as piégé, criait Peter en prenant Justine à la gorge. Tu vas me le payer.

    -          - Peter, lâche-moi. Je ne savais pas ce qu’ils allaient faire. Comme tu peux le voir moi aussi je suis prise au piège.

    -          - Mmmm, ouais, tu n’as pas tort, dit-il en la relâchant.

    J’avais envie d’exploser, de lui mettre mon poing dans la figure. Je trépignais mais c’était sans compter Mathilda qui me tenait le bras.

    Justine commençait à lui parler. Elle lui racontait ses jours heureux à ses côtés, ce qu’il lui avait apporté. La tristesse et l’incompréhension à l’annonce de sa mort. Elle a essayé de lui expliquer l’évolution de ses sentiments après la perte de celui qu’elle aimait. Car oui elle l’avait aimé de tout son cœur, de toute son âme.

    -          - Mais c’est fini Peter, lui dit-elle d’une voix douce et plus sûre. Il faut que tu partes. Je n’oublierais pas l’amour que j’avais pour toi. Tu auras toujours une place dans mon cœur mais chacun de nous doit suivre un nouveau chemin. Je te dis au revoir Peter. Je te pardonne pour tout ce que tu m’as fait après ta mort. Tu n’étais plus toi-même, je le sais. Adieu, va rejoindre la lumière, part vers d’autres cieux où tu seras en paix.

    Peter ne bougeait plus. Il était comme pétrifié. Des larmes coulaient le long de ses joues. Il savait qu’il avait perdu. Il savait qu’il n’avait plus le choix, qu’une force invisible le poussait. Justine lui avait fait ses adieux, elle avait tourné la page et c’est comme si elle avait brisé le lien transparent qui les tenait prisonnier l’un de l’autre.

    Peter regardait autour de lui. Il faisait enfin attention à notre public. C’est alors que la peur s’est ancrée sur son visage. Il avait vu les anges. Il avait compris ce qu’il l’attendait et que le jugement serait définitif.

    -          - Noooooooonnnnnnnn ! criait-il, ne pouvant s’échapper.

    C’était comme si des bras imperceptibles le tiraient alors qu’il se débattait et qu’il essayait de s’échapper de leur emprise. Enfin il a disparu mais nous entendions toujours ses cris qui perçaient le silence du cimetière. Puis plus rien.

    Je courais vers Justine mais je me suis très vite retrouvé sur le sol. La barrière qui avait empêché Justine et Peter de partir, me refusait l’entrée. Je fulminais et tournait comme un lion essayant de trouver une brèche afin de retrouver ma belle.

    -          - Vous pouvez partir le spectacle est terminé, criais-je aux fantômes et aux anges. Mathilda libère Justine.

    -          - Je ne peux pas, me dit-elle dans un souffle. La barrière ne m’obéit plus. Quelqu’un d’autre tire les ficelles.

    Je me retournais vers les anges. Pourquoi cette épreuve ? Je les fixais sans faiblir.

    -          - Un nouveau jeu ? Vous vous ennuyez tant que ça au paradis ?

    Aucun son ne sortait de leur bouche. D’ailleurs ils étaient tellement lumineux que je ne pouvais apercevoir leur visage. Je ne savais pas si c’était des hommes ou des femmes.

    -          - Grégoire ! Qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce que tout ça veut dire ? demandait Justine d’une voix tremblante.

    -          - Tu ne vois pas qu’ils jouent encore avec nos sentiments.

    Mathilda s’approchait de moi les mains en avant signe qu’elle ne me voulait aucun mal. Elle prit le bout de bois qu’elle avait jeté plus loin et traçait un cercle autour de moi comme elle l’avait fait un peu plus tôt.

    -          - Mathilda ! Je te croyais de notre côté. Pourquoi vouloir me piéger ?

    -          - Il n’y a aucun piège de ma part. Je suis juste mon instinct et je continue à faire ce qu’on avait prévu.

    J’arrivais à me calmer et tournait ma tête vers Justine lui faisant un signe de la main pour la rassurer.

    Je respirais profondément les yeux fermés. Lorsque je les ai ouvert à nouveau j’ai cherché du regard mon meilleur ami.

    -          - Sam ! Dis-je doucement.

    Il avait compris. Il s’est avancé afin de me rejoindre à l’intérieur du cercle. Ma gorge se serrait et je sentais que les mots auraient du mal à sortir de ma bouche. Mais je devais le faire, je devais le libérer.

    -          - Oh Sam ! Comment te dire ce que je ressens en ce moment ?

    -          - Ouvre ton cœur mon ami.

    -          - Nous nous connaissons si bien. Par où commencer ?

    -          - Ma mort ?

    -          - Non. Pas ta mort, du moins pas tout de suite. De ton vivant tu as été mon meilleur ami, mon frère. Nous étions inconscients, jeunes, débordant de vitalité et certainement inconscient de nos légers débordements.

    Sam riait à ces souvenirs et partageait certaines anecdotes qui prouvaient notre complicité. J’ai vite repris mon sérieux.

    -          - Te perdre Sam a été une si rude épreuve. Je me retrouvais seul et tellement vide. Je n’avais plus goût à la vie et toutes les personnes que je croyais aimer ce sont éloignés sans même se retourner. Mais je les blâme pas je sais maintenant que c’est moi qui les ai chassé de ma vie.

    -          - Moi aussi je souffrais, me dit Sam. Au début je t’en voulais d’être encore en vie et moi pas ! Mais j’ai suivi la lumière. J’aurais pu rester cependant je savais que je n’avais plus ma place ici bas. J’ai fini par accepter ma condition et l’on m’a formé.

    -          - On t’a formé ? lui demandais-je.

    -          - Oui. On m’a fait le plus beau des cadeaux devenir un ange gardien. Mais ils ont senti notre lien. Ils m’ont envoyé pour te servir de guide car toi aussi tu avais un rôle à jouer, ils faisaient de toi un passeur d’âmes.

    -          - Et nous nous sommes retrouvés, nous avons retrouvés notre complicité d’avant. Tu refaisais parti de ma vie.

    -          - Nous comptions un peu trop l’un sur l’autre sauf que je faisais parti du monde des morts alors que toi tu faisais parti du monde des vivants. Mon instructeur m’a ouvert les yeux. Il m’a fait comprendre que nous devions prendre des chemins différents pour notre bien. Mais le plus important c’est que tu devais vivre Greg, tu devais aller de l’avant pour ne pas sombrer dans une folie que te guettait.

    -          - Alors tu as décidé de me sauver en faisant en sorte que je rencontre Justine.

    -          - Oui et non. J’ai négocié avec ceux-là, me dit-il en pointant son doigt vers les anges. Ils devaient me laisser une année pour leur prouver que je pouvais te laisser vivre ta vie. Je leur ai rappelé tout ce que tu avais fait pour eux, toutes ces âmes que tu avais sauvé sans rien demander en retour. Je les ai supplié de mettre sur ton chemin quelqu’un qui pourrait te rendre heureux. C’est eux qui ont fait le reste, c’est eux qui ont  choisi Justine. La suite tu la connais.

    -          - Oui Sam, je la connais. Merci pour ce que tu as fait. Je suis heureux Sam. Grâce à Justine je ne me sens plus aussi coupable d’être en vie. J’aurais tellement voulu mourir à ta place.

    -          - Stop ! Non ! N’ajoutes rien. Je n’ai pas à te pardonner. Ton bonheur me suffit. Tu n’es plus triste pour moi ?

    -          - Si bien sûr mais je l’accepte maintenant. Sam je te laisse partir, j’ai été si égoïste de te garder auprès de moi. Jamais je ne t’oublierais. Je t’aime mon frère, mon ami.

    A ce moment nous n’avions plus l’allure de macho insensible. Nos regards se sont croisés et chacun de nous laissait tomber ses larmes sur ses joues. Mon cœur se serrait comme pour le jour où l’on m’avait appris sa mort.

    Je disais adieux à mon meilleur ami et ça faisait mal. Mais je voulais son bonheur autant qu’il voulait le mien.

    Puis il a fait quelques pas en arrière et il est sorti du cercle sans aucunes difficultés.

    -          - Grégoire Mc Dowells, dit une voix sortant de la lumière éblouissante. Chérissez votre cadeau comme le plus précieux de tous les trésors. Nous n’avons pas l’habitude de donner une deuxième chance. Cette jeune femme est celle qui vous est destinée. Nous l’avons trouvé pour vous et nous l’avons mis sur votre chemin. Nous sommes reconnaissants pour l’aide que vous nous apportez. Vous êtes quelqu’un de bien, Grégoire.

    -          - Alors pourquoi tout ce cirque ? Pourquoi sommes-nous prisonniers à cet instant ?

    -          - Vous n’êtes pas prisonniers. C’est juste une protection nous concernant. Vous ne devez pas nous approcher.

    -          - Mathilda le peut ? demandais-je en la regardant.

    -          - Non ! Avec elle nous procédons autrement. C’est plutôt une barrière mentale que nous dressons. Ah oui ! j’oubliais ce n’était pas, comment vous dites ? Ah oui un cirque. Pardonnez-nous mais les distractions sont rares dans notre monde et nous sommes toujours curieux de voir jusqu’où peut aller la race humaine.

    -          - Nous n’avons été qu’une distraction ? C’est pour ça que vous n’êtes pas intervenu avec Peter ? Vous vouliez voir de quelle façon l’histoire prendrait fin.

    -          - Oui. Je dois bien l’avouer maintenant.

    J’ai senti un poids en moins tout d’un coup comme si je ne ressentais plus aucune pression. C’est Justine qui a compris la première et sa main est venue prendre la mienne.

    J’ai eu un léger sursaut mais lorsque je l’ai vu près de moi je l’ai enveloppé de mes bras et j’ai enfoui mon visage dans son cou. Notre étreinte ne s’est arrêtée que lorsque Mathilda a posé sa main sur mon dos.

    -          - C’est terminé les enfants, ils sont partis.

    -          - Sam ! criais-je à ce moment là.

    -          - Lui aussi est parti. Tu lui as fait tes adieux bien que je me demande si ce n’est pas qu’un au revoir. Il avait son sourire de brigands lorsqu’il m’a regardé avant de disparaitre. Rentrons, nous avons besoin d’une bonne nuit de sommeil.

     

     

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