• Loin de la Rue - chapitre 5

     

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    CHAPITRE 5




    Elle était dans son duvet, moi contre elle. Elle me racontait sa journée et moi j’étais allongé pour lui tenir chaud. J’avais hâte qu’elle arrive au moment de notre rencontre. Enfin elle y arriva.

    - Tu sais j’ai encore revu le garçon de la semaine dernière. Celui de la librairie, Mathiew.

    Je redressais ma tête la penchant légèrement en la fixant. Elle riait de me voir ainsi.

    - A chaque fois que tu fais cette tête j’ai vraiment l’impression que tu m’écoutes et que tu me comprends. Tu es un merveilleux compagnon. Mais je sais qu’un jour tu repartiras dans tes montagnes ou dans ta forêt. Tu dois être libre jamais je ne t’empêcherais de t’éloigner de moi.

    Je gémissais légèrement me collant encore plus contre elle. Elle était si triste lorsqu’elle songeait qu’un jour je m’éloignerais.

    - Tu veux savoir la suite c’est ça ? Et bien il m’a presque assommé avec livre. Mais je n’ai pas cru à son manège. Je savais qu’il en avait fait exprès. Mais je ne pouvais pas lui dire que justement je regardais chacun de ses gestes, chacun de ses mouvements. Si il savait ce que j’étais il m’ignorerait comme tout le monde. Je ne peux rien espérer, ma vie est un gouffre dans lequel je m’enfonce de plus en plus. Depuis la mort de mes parents tu es le seul qui m’a réchauffé le cœur mais ce garçon, lui, fait battre mon cœur plus rapidement. Et ses yeux, ses yeux si sombres qui me font penser à quelque chose chaque fois que je le vois. C’est comme si je le connaissais, c’est étrange tu ne trouves pas ?

    Je la regardais, ses larmes coulaient le long de ses joues. Elle s’est couchée en passant un bras au-dessus de moi et s’est endormie en pleurant silencieusement.

    Pourquoi autant de souffrance dans le cœur d’une si jolie jeune femme ? Si je n’avais pas cette apparence animale mes larmes auraient jaillies en même temps que les siennes tellement j’étais bouleversé.

    Il fallait que j’en sache plus. J’ai tenu deux jours avant de retourner voir Monsieur Blackwells.

    - Encore vous Mathiew, me dit-il d’un air espiègle. Si c’est Alice que vous êtes venus voir elle ne travaille pas ici aujourd’hui. Mais demain je pense la voir.

    - C’est vous que je viens voir. Je voudrais en savoir plus sur Alice. Je…

    - Vous vous intéressez à elle. Je l’ai bien compris mais en fait elle est comme un chat sauvage. Si elle apprenait que l’on ait eu cette discussion elle ne me rendrais plus visite.

    - Elle travaille pour vous, non ?

    - Oui et non. J’ai voulu lui donner plus mais si on se montre charitable elle prend la fuite. Je n’ai trouvé que ce moyen pour lui venir en aide.

    - Ça fait longtemps que vous la connaissez ?

    - Presque trois ans.

    - Elle est si jeune.

    - Oui à mon avis elle ne devait pas avoir plus de seize ans lorsqu’on l’a vu trainer par ici. J’ai voulu la sortir de cet univers, lui faire une place derrière pour qu’elle puisse se réchauffer l’hiver mais il n’y a rien à faire. Il y a même une période où je ne la voyais plus à la boutique. Je la voyais passer sur le trottoir d’en face. Elle me boudait alors quand elle a refranchi cette porte je n’ai plus cherché à lui faire faire ce qu’elle ne voulait pas.

    - Est-ce que vous savez d’où elle vient, qu’elle est son histoire ?

    - Non c’est un vrai mystère.

    - La tâche risque d’être plus dure que je ne le pensais.

    - Je peux vous dire quelque chose.

    - Bien sûr.

    - Je vois bien que vous êtes attirés l’un par l’autre. Mais je ne tolèrerais pas que vous lui fassiez du mal. Si vous n’êtes pas sincère je vous demanderais de ne plus la voir, elle ne s’en remettrait pas. Par contre il y a une chose dont je suis certain, l’amour est la seule chose qui pourrait la sortir de cet univers.

    - Je comprends ce que vous voulez dire mais je veux réellement lui venir en aide.

    Je n’avais pas appris grand-chose malheureusement. La seule chose qui m’avait marqué c’était qu’elle était dans la rue depuis ses 16 ans. Je n’arrivais pas à y croire. Qu’est-ce qui a bien pu la pousser à cet extrême ? La mort de ses parents ne devait pas être la seule raison.

    Peut-être qu’un jour elle se confiera à mon autre moi.

    Je rentrais dans mon appartement ne sachant comment venir en aide à Alice.

    Ses paroles résonnaient encore dans ma tête, je lui faisais battre le cœur plus vite. Je l’attirais.

    Je regardais par la fenêtre, il pleuvait depuis ce matin et le froid était toujours là, menaçant les pauvres gens qui dormaient dans la rue de ne pas survivre une seule nuit de plus.

    Mais pour Alice ça n’arriverait pas. Je serais là chaque nuit pour la réchauffer jusqu’au jour où elle aurait suffisamment confiance en mon moi humain pour me suivre jusqu’ici.

    La sonnerie de mon téléphone m’indiquait que j’avais encore un message. Bon sang ils ne me laisseront jamais tranquille. Je ne voulais pas leur parler, j’avais fait le choix de partir pour vivre une vie normale. Je n’avais pas prévu de faire ressortir l’animal de si tôt. Et si ils me cherchaient ? Non ! Je ne les suivrais pas, j’avais réussi le détachement une fois, je ne succomberais pas.

     

    loinrue1

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